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20ème siècle – Tournant important
La fin du 19e et le début du 20e siècle marquent un tournant important. Deux réalisations étroitement liées vont complètement modifier le rôle tenu par le fond de la vallée du Rhône: la correction du lit du fleuve, associée au drainage de la plaine, et le prolongement de la ligne de chemin de fer. Ces travaux vont progressivement renforcer l’axe longitudinal au détriment des axes transversaux. Dans le même temps, les terres gagnées sur les marécages permettent l’émergence d’une nouvelle agriculture (maraîchère et arboricole) et surtout l’extension des périphéries urbaines. Dès lors, la plaine et la montagne s’opposeront de plus en plus. Mais cette rupture, finalement récente, est à relativiser. Les marécages étaient autrefois, comme les pâturages d’altitude, des communaux, propriétés des bourgeoisies. On retrouve donc dès le départ le morcellement foncier typique de l’arrière-pays. Celui-ci s’est dans un premier temps accentué, avant d’être en partie corrigé par les remaniements parcellaires. Globalement, la complexité du tissu agricole valaisan va rendre difficile les améliorations foncières, jugées pourtant nécessaires. Aujourd’hui menacés par le tourisme (dont il vit en partie, avec toutes les contradictions qu’une telle situation peut faire naître), la diminution des exploitations agricoles et, à plus ou moins long terme, l’intégration européenne, le paysan de montagne s’interroge. Son avenir, pour la première fois, ne dépend plus que de lui-même.
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Les valaisans ont appartenu avant tout à une « civilisation des herbages ». Cela n’a pu être possible que parce qu’ils se rattachaient aussi à une civilisation de l’eau. Tributaires d’un climat plutôt sec, les agro-pasteurs ont très vite été confrontés à la nécessité de l’irrigation; l’ingénieux système des bisses, ensemble de conduites en bois et de canaux creusés amenant l’eau et la distribuant par gravité dans les prairies, a non seulement permis la bonification des pâturages, mais a aussi entraîné des pratiques communautaires qui ont fortement resserré les liens sociaux au sein des vallées.
A ces usages collectifs de l’eau, il faut encore ajouter, autre élément remarquable, la gestion commune des pâturages d’alpage. Réunis en consortages, les paysans ne sont pas des propriétaires privés mais disposent d’un droit de jouissance cédé, contre redevance, par les bourgeoisies (celles-ci, à la différence des communes, ne regroupent que les personnes dont l’origine est celle du village de souche). Toutefois ces nombreuses pratiques communautaires, qui pourraient remonter à l’époque burgonde, n’ont jamais véritablement effacé le caractère profondément individualiste et familial de l’exploitation paysanne.
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UNIL, IGD-FGSE & EPFL, LaSIG-ENAC (2012) eAtlas du Valais. Atlas interactif du Canton du Valais. Université de Lausanne, Canton du Valais. URL : < http://www2.unil.ch/eatlasvs/>. Repris de http://www2.unil.ch/eatlasvs/wp/?page_id=515><décembre 2012>.
Le Valais, un espace composé« Dès l’origine, la montagne physique et son double social sont liés, indissolublement. »Jean-Claude Bozonnet (1989)
L’espace valaisan d’avant 1850 est d’ordre essentiellement rural : les populations qui l’ont colonisé sont parties initialement de la plaine du Rhône ; son caractère marécageux, les nombreuses crues et inondations du fleuve les incitèrent à mettre d’abord en valeur les parties nettement exondées (cônes de déjection ou d’éboulement) et les versants. Telle a été, à l’origine, la zone privilégiée de peuplement, en fait le premier centre de gravité du Valais.
Depuis les temps les plus anciens, les paysans autochtones pratiquaient essentiellement l’élevage, les cultures ne jouant qu’un rôle d’appoint. Il en résulte, suite à l’essor démographique, une colonisation tournée d’abord vers la recherche de nouveaux pâturages. Partant du sillon rhodanien, les éleveurs vont progressivement remonter les vallées latérales, les premiers mayens devenant dès lors des villages permanents.
Cette extension vers les vallées est probablement à l’origine des dizains du Moyen Âge. Elle est surtout la raison essentielle de l’étagement des terroirs communaux qui reste, aujourd’hui encore, l’une des spécificités majeures du canton. Ainsi, les exploitations agricoles ont investi l’espace de manière transverse: s’échelonnant de la plaine du Rhône à la limite supérieure des alpages, vers 2500 mètres d’altitude.
Une telle occupation du sol reproduit les principales étapes de la colonisation. Les villages des hautes vallées n’échappent pas à cette règle: tournés d’abord vers le haut (avec la zone intermédiaire des mayens, située entre 1300 et 2000 mètres environ, ils gardent néanmoins des possessions en contrebas, c’est-à-dire sur les versants rhodaniens. Ces propriétés seront pour la plupart, consacrées à la vigne, notamment du côté de l’adret.
La conséquence la plus manifeste de l’étagement des terroirs est le caractère fragmenté des propriétés foncières. Chaque exploitation se répartit entre le fond de la vallée, ses versants, les alentours du village et les mayens. Il en découle un morcellement des propriétés qui, à terme, ne permet plus d’assurer la rentabilité des domaines. Cette dispersion du foncier est probablement l’une des causes originelles de la pluriactivité.
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