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20ème siècle – Tournant important
La fin du 19e et le début du 20e siècle marquent un tournant important. Deux réalisations étroitement liées vont complètement modifier le rôle tenu par le fond de la vallée du Rhône: la correction du lit du fleuve, associée au drainage de la plaine, et le prolongement de la ligne de chemin de fer. Ces travaux vont progressivement renforcer l’axe longitudinal au détriment des axes transversaux. Dans le même temps, les terres gagnées sur les marécages permettent l’émergence d’une nouvelle agriculture (maraîchère et arboricole) et surtout l’extension des périphéries urbaines. Dès lors, la plaine et la montagne s’opposeront de plus en plus. Mais cette rupture, finalement récente, est à relativiser. Les marécages étaient autrefois, comme les pâturages d’altitude, des communaux, propriétés des bourgeoisies. On retrouve donc dès le départ le morcellement foncier typique de l’arrière-pays. Celui-ci s’est dans un premier temps accentué, avant d’être en partie corrigé par les remaniements parcellaires. Globalement, la complexité du tissu agricole valaisan va rendre difficile les améliorations foncières, jugées pourtant nécessaires. Aujourd’hui menacés par le tourisme (dont il vit en partie, avec toutes les contradictions qu’une telle situation peut faire naître), la diminution des exploitations agricoles et, à plus ou moins long terme, l’intégration européenne, le paysan de montagne s’interroge. Son avenir, pour la première fois, ne dépend plus que de lui-même.
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Issu de l’histoire et composé par l’homme, l’espace valaisan est donc aussi un espace social fondé sur des structures stables dans le temps. Dès lors, les innovations récentes, même spectaculaires, se superposent plus qu’elles ne se substituent aux anciennes. À ce titre, l’exemple de la pluriactivité, qui a en partie permis le maintien d’une agriculture de montagne, est des plus symptomatiques. Elle s’est généralisée dès les années 1945, avec, dans un premier temps, la construction des barrages puis, très vite, l’extension et l’amélioration du réseau routier. Cela a rendu beaucoup plus facile l’accès à la plaine ou aux stations touristiques. Ainsi, les paysans ont pu progressivement pratiquer une double activité: celle d’agriculteur, devenue accessoire mais rendue possible grâce au soutien essentiel des familles, et celle d’ouvrier en plaine ou d’employé dans les secteurs touristiques de montagne (notamment dans l’hôtellerie, le commerce, les remontées mécaniques ou encore les cours de ski). De même, les vieilles structures agraires, n’ont pas totalement disparu. Elles ont été en fait redéfinies, réadaptées aux nouvelles exigences de la pluriactivité, seule garante du maintien de certaines exploitations devenues non rentables. Cette pratique, aujourd’hui généralisée en Valais, touche le 85% des exploitations agricoles.
Le premier des deux schémas ci-haut montre les anciennes pratiques de transhumance, telles qu’on pouvait les rencontrer autrefois en Valais. Elles se caractérisaient par un mouvement saisonnier des familles et du bétail, entre le village, les mayens et les alpages d’altitude, en fonction des époques de pâture, de fenaison ou de récoltes. Si la montée à l’alpage (inalpe) du mois de juin et la désalpe de fin septembre se font encore aujourd’hui pour le bétail, les familles par contre restent le plus souvent au village.
Le second schéma donne, pour sa part, l’horaire de travail du paysan-ouvrier qui, quotidiennement, descend en plaine pour travailler (soit en usine, soit, et c’est de plus en plus le cas, comme employé dans le secteur des services). Devenue activité accessoire, l’agriculture de montagne peut donc continuer à subsister.
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Organisation et Histoire Médiathèque du Valais : http://www.wikivalais.ch/index.php/Consortages_en_Valais
Par consortage, on entend une gestion communautaire du travail et des biens collectifs. Dans ce cadre, les consorts - ou corporatistes - disposent de droits et de devoirs, qui sont définis par des statuts et des règlements établis, préalablement, par écrit. La participation aux travaux communautaires (manœuvre, corvée) et la prise en charge des fonctions relèvent particulièrement des devoirs des consorts, alors que, dans les droits, figurent l’utilisation des biens et des aménagements communs.
En Valais, les consortages respectivement le système de corporation se sont développés sur le modèle des corporations paysannes du Moyen Age. Des siècles durant, les consortages ont organisé la vie économique paysanne du Valais, au moyen de manuels de droits et d’ordonnances. Ils réglementaient, en particulier, l’usage des biens communs tels que l’eau, les forêts ou les alpages et étaient responsables de la construction ainsi que de l’entretien des infrastructures communes comme les bisses, les chemins sentiers, les aménagements d’alpage ou encore les fours à pain.
Comme témoins de cette réalité, nous retrouvons des documents au sujet des consortages dans pratiquement toutes les archives des communes valaisannes ainsi qu’aux archives de l’État : vente et échange des droits sur les alpages, règlements, dossiers des procès, règlementations sur l’exploitation des forêts et des eaux, procès-verbaux des assemblées des consorts etc. Dès le 13e siècle, on trouve des documents attestant des ventes de droits sur les alpages. La codification écrite des consortages d’alpages et des eaux, sous forme de statuts, a eu lieu avant tout au 16e et au 17e siècle.
Malgré le changement du contexte économique et social, les consortages remplissent encore, actuellement, une fonction importante sur le plan juridique, économique, écologique et social en Valais. Une préoccupation fondamentale des consortages a été de tout temps la recherche d’un équilibre entre d’un côté la conservation à long terme des ressources et de l’autre son exploitation optimale et sa gestion rationnelle. En outre, l’administration collective et la jouissance des biens sont économiques et renforcent une forme de solidarité obligatoire, une unité entre les membres et le sentiment de responsabilité envers le bien communautaire. Ces fonctions écologiques et sociales confèrent au système de consortage un grand potentiel pour le futur.
Aujourd’hui, le système de consortage en Valais est règlementé juridiquement par la « Loi d’application du code civil suisse du 24 mars 1998 » (articles 126 à 131). Cette dernière met en avant à l’article 126 § 1: « les sociétés d’allmends, les consortages d’alpages, de forêts, de fontaines, de bisses ou de réunions parcellaires, et d’autres corporations semblables, sont soumis au droit civil cantonal à moins qu’ils ne relèvent de la loi sur l’agriculture ou la de la loi sur les bourgeoisies ». De plus, cette loi impose au Conseil d’État d’approuver de manière conforme les statuts et les règlements. L’article 129 § 2 garantit l’exploitation durable des biens communautaires : « les biens sociaux objets de cette exploitation ne peuvent être aliénés ou engagés de façon à entraver ou à rendre difficile l’excès à leur exploitation ».
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Le système de consortage s’est développé, en Valais, de la manière la plus prononcée, dans l’économie alpestre. Dans ce domaine, les formes juridiques et de propriété ainsi que celles relatives à la gestion étaient règlementées de manière précise. Il y avait, en effet, d’un côté, les alpages dont les consorts avaient la possession en commun qu’ils utilisaient collectivement. D’un autre côté, existaient des alpages qui avaient des formes de propriété semblables aux consortages, mais dont l’exploitation était privée. Les droits des consorts, par exemple le droit d’exploiter les pâturages, et leurs devoirs. Le travail communautaire ou les charges administratives étaient soit consignés dans des règlements soit se référaient au droit coutumier, voire au droit local. Les conditions d’admission au collectif et l’établissement du nombre maximum de bétail durant un nombre de jours déterminés, ce qui avait pour but d’éviter une surexploitation des pâturages et constituaient des composantes importantes de ces règlements...
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